
L’été passé, lors de mon séjour à Paris, j’avais malheureusement manqué Holy Motors de Leos Carax. Par conflit d’horaire, je m’étais retrouvé dans la salle du dernier Spider-Man. Quatre mois plus tard, j’assiste à mon deuxième film de Carax. Dans le cadre d’un cours universitaire, je m’étais fait imposer Mauvais sang que je n’avais pas vraiment apprécié. À ce moment-là, je n’étais peut-être pas mûr ou simplement pas assez préparé au cinéma de ce réalisateur français.
Mise en garde : si vous aimez le cinéma de nature conventionnelle ou conservatrice, vous détesterez le cinéma de Leos Carax ou Holy Motors. Il s’agit d’un film à la fois éclaté où vos repères de spectateur seront mis au défi. Oubliez le temps d’un instant le cinéma classique et laissez-vous emporter par la magie du cinéma, celle où tout est possible.
La dernière œuvre de Carax est le récit d’un homme (Denis Lavant). Un homme aux multiples visages, un homme parmi tant d’autres. Au cours du film, on suit un homme d’affaires se balader en limousine avec sa chauffeuse privée. Il est très occupé, il a de nombreux rendez-vous au cours de sa journée. D’un rendez-vous à l’autre, il change de personnalité, de statut, de titre, de vie. Il passe du mendiant au banquier ou même de l’accordéoniste au mourant. Il est à la fois un homme ou un autre peut-être.
Le génie d’Holy Motors réside dans la réalisation de Carax. On ressent son amour pour le septième art. D’un personnage à l’autre, Lavant incarne un genre cinématographique. Que ça soit le film de gangsters, la comédie musicale ou un film d’image de synthèse, Carax démontre le caractère inventé du cinéma. De la fiction, du cinéma avant tout. En effet, le film s’avère être une mise en abyme du médium cinématographique. Tout comme Jean-Luc Godard, cinéaste français important, Carax s’amuse à démontrer les mécanismes derrière le cinéma, à dévoiler aux spectateurs qu’ils sont avant tout devant quelque chose de fabriqué et même d’organique. Que ça soit le fait d’indiquer au spectateur qu’il est rendu à la moitié de l’œuvre en insérant un entracte où le protagoniste se met à jouer de l’accordéon ou d’inclure une performance musicale de la chanteuse Kylie Minogue, il est impossible d’oublier que nous sommes véritablement en train de regarder un film. Empruntant ainsi au théâtre, le processus de distanciation amené par Bertolt Brecht, processus pour lequel divers procédés ou techniques sont utilisés pour rendre le spectateur plus actif face à une oeuvre d’art.
Holy Motors de Leos Carax est peut-être le film le plus original de l’année 2012 en terme de mise en scène. Il s’agit d’une œuvre accomplie dont on peut souligner l’importance de l’interprète Denis Lavant (acteur fétiche de Carax) qui occupe plusieurs rôles dans le film. Après avoir été initié au style de Leos Carax, je crois qu’il va falloir que je revisite Mauvais sang et que je consulte sa filmographie dans l’espoir de faire à nouveau de belles découvertes.
